Des billets pour vous présenter la matière des droits d'auteur (et plus…)
Update (04/04/2013): Concernant la loi du 1er mars 2012 et son application via le registre ReLire, je ne peux que vous conseiller de lire les billets de Lionel Maurel, dont celui-ci par exemple.
Update (21/03/2013): La banque de données hébergées sur le site de la BnF est dès à présent disponible à l’adresse suivante: http://relire.bnf.fr/
Cette banque de données reprend 60.000 livres indisponibles du XXème siècle (livres sous droits d’auteur, publiés en France avant le 1er janvier 2001, et qui ne sont plus commercialisés). Rappelons que si les titulaires de droits ne s’y opposent pas, ces livres entreront en gestion collective en septembre 2013. Ils pourront alors être remis en vente sous forme numérique!
La société de gestion française choisie est la SPRD Sofia http://www.la-sofia.org/sofia/Adherents/index.jsp
Nous conseillons donc à tous et à toutes d’aller vérifier la banque de données de la BnF afin de voir si oui ou non elle contient ses livres. Et vite!
Une question intéressante à se poser à la suivante: quid si un auteur belge remarque que son livre est dans la banque de données de la BnF et qu’il décide d’y rester? Selon le site de la BnF (http://relire.bnf.fr/doc/DEPLIANT-ReLIRE-08032013.pdf), il y aura rémunération des ayants droit via la société de gestion Sofia. Mais pour combien exactement, cela n’est pas indiqué…
Le Journal Officiel français a publié vendredi 1er mars 2013 le décret n° 2013-182 du 27 février 2013 portant application des articles L. 134-1 à L. 134-9 du code de la propriété intellectuelle et relatif à l’exploitation numérique des livres indisponibles du XXème siècle.
Voici un lien vers le moteur de recherche du Journal officiel pour retrouver le Journal officiel du 1er mars 2013 contenant le décret en question.
Je vous avais longuement présenté la loi française ici.
Le décret comporte trois articles:
Le « Registre des livres indisponibles du XX siècle » sera consultable sur le site internet de la Bibliothèque nationale de France (BnF). La liste ne sera pas actualisée continuellement mais annuellement à la date anniversaire du 21 mars.
La liste des livres indisponibles qui y sont enregistrés est arrêtée par un comité scientifique placé auprès du président de la Bnf et composé, en majorité et à parité, de représentants des auteurs et des éditeurs. La composition et le fonctionnement de ce comité seront déterminés par arrêté du ministre chargé de la culture.
A chaque livre indisponible sont associées des données et informations dont la liste figure en annexe au décret. Ces données et informations sont issues des bases bibliographiques publiées par la BnF et par les organisations professionnelles du secteur du livre.
Les données et les informations sont les suivantes:
1. Noms et prénoms ou pseudonymes du ou des auteurs.
2. Précisions sur la qualité de l’auteur (préfacier, illustrateur…).
3. Année du décès du ou des auteurs.
4. Mention d’un numéro d’identification de l’auteur.
5. Dénomination de « l’auteur collectivité ».
6. Titre du livre.
7. Nom ou raison sociale de l’éditeur.
8. Année de publication du livre.
9. Mention de l’édition (notamment première édition, édition revue, édition augmentée…).
10. Mention de la collection.
11. Caractère illustré du livre.
12. Nombre de volumes et nombre de pages.
13. Mention du numéro international normalisé du livre (ISBN).
14. Mention d’un numéro d’identification pérenne du livre.
15. Mentions prévues aux articles L. 134-4, L. 134-5 et L. 134-6 du CPI.
16. Mention prévue à l’article R. 134-3, selon laquelle le livre fait l’objet d’une déclaration d’opposition en
cours d’instruction.
Le titre du livre ainsi que les données et informations le concernant seront effacées par la BnF à l’expiration du délai de protection légal.
De plus:
Il s’agit ici des dispositions les plus compliquées à comprendre du décret. Pour bien les comprendre, il faut avoir en tête le processus mis en place par la loi de 2012 pour pouvoir inscrire un livre dans la banque de données de la BnF, possibilité donnant par après droit à la SPRD agréée (notons que rien n’empêche qu’il puisse y en avoir plusieurs d’agréées par le/la ministre de la culture) d’autoriser à des éditeurs d’exploiter numériquement les livres alors considérés comme indisponibles.
Je renvois encore à mon billet qui vous l’expliquait dans le détail.
Le voici ici encore résumé:
En général, toutes les oppositions et les demandes de retrait devront :
Ce point concerne:
Plus spécifiquement,
I. le droit d’opposition de l’auteur ou de l’éditeur (disposant du droit de reproduction imprimée du livre) qui court durant les 6 premiers mois devra être exercé auprès de la BnF (c’est logique car aucune autorisation n’a encore été délivrée par la SPRD agréée qui n’intervient qu’après ce délai de 6 mois). Dès réception de ce droit d’opposition, la BnF devra inscrire dans le Registre une mention selon laquelle le livre fait l’objet d’une déclaration d’opposition en cours d’instruction. La BnF devra en informer les SPRD agréées ainsi que leur communiquer les pièces produites à l’appui de la demande d’opposition et ce dans un délai d’un mois.
A partir de ce moment-là, commence à courir un nouveau délai de 3 mois.
En effet, les SPRD agréées ont alors 3 mois pour établir que la déclaration d’opposition a été présentée par une personne qui n’avait pas qualité pour ce faire. Si les SPRD agréées n’y arrivent pas (et donc, si la demande d’opposition est déclarée fondée), la BnF devra inscrire dans la banque de données une mention selon laquelle ces SPRD ne peuvent exercer le droit d’autoriser la reproduction et la représentation sous forme numérique du livre concerné. De plus, dans le cas où la déclaration d’opposition émane de l’auteur du livre indisponible, la BnF cessera de rendre accessible au public les données et les informations relatives à ce livre. Pourquoi ne pas rendre ces données inaccessibles également lorsque la demande d’opposition déclarée fondée a été introduite par l’éditeur?
II. le droit d’opposition de l’auteur d’un livre indisponible que ce dernier peut opposer à tout moment s’il juge que l’exploitation numérique est susceptible de nuire « à son honneur ou à sa réputation » doit s’exercer auprès de la SPRD agréée. Parallèlement au cas précédent, les SPRD agréées ont 3 mois pour établir que la déclaration d’opposition a été présentée par une personne qui n’avait pas qualité pour ce faire. Si la SPRD concernée échoue à pouvoir le démontrer, elle devra en informer la BnF qui cessera de rendre accessibles au public les données et informations relatives à ce livre.
III. le droit d’opposition de l’auteur que ce dernier veut exercer dans le cas où la SPRD agréée a délivré son autorisation à l’éditeur disposant du droit de reproduction du livre sous une forme imprimée et lorsque l’auteur voudrait démontrer que l’éditeur ne dispose pas de ce droit de reproduction doit être réalisé auprès de la SPRD agréée. A l’appui de son opposition, l’auteur devra produire tout élément probant de nature à établir que l’éditeur ne dispose pas du droit de reproduction du livre concerné sous une forme imprimée. La SPRD communiquera ces éléments à l’éditeur, qui disposera d’un délai d’un mois pour présenter ses observations. A défaut d’établir dans les 3 mois suivant la réception de ces pièces que la déclaration d’opposition n’est étayée d’aucun élément probant, la SPRD retirera l’autorisation délivrée à l’éditeur. N’y a-t-il pas une contradiction entre ces deux délais, celui d’un mois et celui de 3 mois? Ou bien faut-il considérer que l’éditeur a un mois pour prouver qu’il dispose bien du droit de reproduction du livre en question et les 3 mois concernent la SPRD qui a aussi en quelque sorte intérêt à ce que le livre soit exploité numériquement? Ce n’est pas clair pour moi…
IV. le droit de retrait que peuvent exercer conjointement et à tout moment l’auteur et l’éditeur disposant sur le livre de l’auteur du droit de reproduction sous une forme imprimée doit être exercé auprès de la SPRD agréée. Ce droit au retrait s’exerce selon les formes générales mentionnées plus haut.
V. l’auteur d’un livre indisponible dispose également toujours d’un droit au retrait de son livre de la banque de données lorsqu’il considère qu’il est le seul titulaire des droits d’exploitation numérique sur son livre. Ce droit devra être exercé auprès de la SPRD agréée. L’auteur devra apporter à l’appui de sa demande de retrait tout élément probant de nature à l’établir. La SPRD agréée communiquera ces éléments à l’éditeur, s’il existe. Ce
dernier disposera alors d’un délai d’un mois pour présenter ses observations. A défaut d’établir dans les 3 mois suivant la réception de la demande de retrait que cette demande a été présentée par une personne n’ayant pas qualité pour ce faire ou l’ayant fait à tort, la SPRD perdra le droit d’autoriser l’exploitation numérique du livre.
VI. le titulaire du droit de reproduction du livre sous une forme imprimée peut obtenir (obligation de résultat) à tout moment et immédiatement de la SPRD que la SPRD cesse de délivrer des autorisations gratuites aux bibliothèques publiques qui demanderaient, dans dix ans, à pouvoir exploiter le livre indisponible. Ce droit au retrait s’exerce selon les formes générales mentionnées plus haut.
L’art. 2 du décret précise les conditions pour qu’une SPRD puisse obtenir l’agrément ministériel pour pouvoir délivrer l’autorisation d’exploitation numérique des livres indisponibles.
Les conditions ici énoncées au nouvel art. R. 3217-1 sont à rapprocher de celles déjà précisées à l’art. L. 134-3, III de la loi du 1er mars 2012.
L’art. L. 134-3 comporte 8 conditions qui sont dans le décret reprises et à chaque fois précisées.
Il faudra, pour obtenir l’agrément ministériel, que la SPRD:
La SPRD devra envoyer sa demande d’agrément, accompagnée de son dossier, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception au ministre chargé de la culture, qui en délivrera récépissé. Lorsque le dossier n’est pas complet, le ministre chargé de la culture demandera
par lettre recommandée avec demande d’avis de réception un dossier complémentaire, qui doit être remis dans la même forme dans un délai d’un mois à compter de la réception de cette lettre.
L’agrément sera accordé pour cinq années, renouvelable dans les mêmes conditions que l’agrément initial.
Tout changement de statut ou de règlement général, et toute cessation de fonction d’un membre des organes délibérants et dirigeants d’une société agréée sont communiqués au ministre chargé de la culture dans un délai de quinze jours à compter de l’évènement correspondant. Le défaut de déclaration peut entraîner le retrait de l’agrément.
=> qu’est-ce qu’un organe délibérant d’une SPRD?
Si une société agréée cesse de remplir l’une des conditions fixées par ce décret, le ministre chargé de la culture la mettra, par écrit, en demeure de respecter les conditions de l’agrément. Le bénéficiaire de l’agrément disposera alors d’un délai d’un mois pour présenter ses observations et, le cas échéant, les mesures de mise en conformité qu’il entend mettre en œuvre. Le retrait de l’agrément est prononcé par arrêté du ministre chargé de la culture, publié au Journal officiel de la République française.
La loi de 2012 précisait que les ayants droit devaient être correctement informés sur l’existence de cette loi (assez révolutionnaire dans son principe rappelons-le).
Le décret prévoit à ce sujet que les ayants droit seront informés via une campagne d’information qui devra être menée à l’initiative du ministère de la culture et ce en liaison avec les SPRD et les organisations professionnelles du secteur du livre. La campagne en question comprendra la présentation du dispositif sur un service de communication au public en ligne, une opération de publipostage en ligne, la publication d’encarts dans la presse nationale ainsi que la diffusion de bannières sur des sites internet d’information. Elle débutera « à la date prévue au premier alinéa de l’article R. 134-1 » et se poursuivra durant une période de 6 mois.
La date de commencement de la campagne n’est pas claire. En effet, le premier alinéa de l’art. R. 134-1 stipule ce qui suit:
« La base de données publique mentionnée à l’article L. 134-2 est dénommée “Registre des livres indisponibles du XXe siècle”. Elle est ouverte à la consultation du public sur le service de communication au public en ligne de la Bibliothèque nationale de France. Elle est enrichie d’une nouvelle liste de livres indisponibles le 21 mars de chaque année, s’il est ouvré, ou le premier jour ouvré suivant. »
Il n’y a donc pas vraiment de date dans ce premier alinéa! Sauf celle du 21 mars mais qui ne concerne que la date à laquelle la BnF devra obligatoirement mettre sa banque de données à jour. Pas celle à partir de quand la banque de données sera ouverte au public. On ignore encore totalement cette date! On ignore donc encore totalement la date de commencement de la campagne. En effet, on aurait pu croire que le texte du décret allait disposer que la campagne allait commencer lorsque la banque de données serait ouverte au public mais le texte final ne le dit pas… On ne peut que le supposer pour que cela ait un sens.
Le décret termine avec un article bien mystérieux pour moi.
Je le reproduis ici:
« Art. R. 327-7. − L’auteur et l’éditeur d’un livre indisponible disposent d’un délai de six mois à compter de l’inscription de ce livre dans la base de données mentionnée à l’article L. 134-2 pour désigner conjointement une société agréée de perception et de répartition des droits. A l’expiration de ce délai, la gestion du droit d’autoriser l’exploitation numérique de leurs livres indisponibles est confiée à la société réunissant le plus grand nombre de livres indisponibles gérés.
Le ministre chargé de la culture désigne chaque année la société répondant à la condition définie à l’alinéa précédent. »
Donc, lorsqu’un livre a été inscrit dans la banque de données de la BnF, l’auteur ET l’éditeur d’un livre indisponible (doivent-ils agir conjointement ou bien chacun dispose-t-il de ce droit séparément?) dispose d’un délai de 6 mois pour désigner conjointement (donc, ils doivent exercer ce droit conjointement – j’ai la réponse à ma question précédente, merci) une SPRD. A l’expiration de ce délai de 6 mois, la gestion du droit d’autoriser l’exploitation numérique des livres indisponibles de l’auteur et de son éditeur est confiée à la « société réunissant le plus grand nombre de livres indisponibles gérés.
Avouez comme moi que cela reste peu clair:
Cette disposition semble être une disposition clef mais je n’en saisis pas encore la portée.
Je continuerai à vous tenir au courant de l’évolution de cet important dossier tant pour la France que pour la Belgique qui pourrait s’en inspirer.
Pingback: France-Analyse du texte définitif de la loi relative à l’exploitation des livres indisponibles | Blog d'Axel Beelen